Le cinéma français cette année a pris des couleurs. Omar Sy, JoeyStarr, Thomas N’gijol et Fabrice Eboué se sont retrouvés à l’affiche de films populaires. Afin d’ éviter que le public somnole dans les confortables sièges du Châtelet ou devant leurs écrans de télévision lors de la 37 ème Cérémonie des Césars l’Académie pourrait pour une fois créer l’événement. Sur Twitter les journalistes David Abiker, puis Bruce Toussaint se sont déjà prononcés : si Sy (Merci Jean Roucas) n’obtient pas un César l’un présentera son émission en caleçon et l’autre rasera sa barbe ! Les nominés sont…
OMAR SY dans « Intouchables »
Déjà plus de six millions d’entrées, des critiques unanimes…A quelques exception près. Libé tire à boulets rouges et pour les Inrocks le film de Eric Toledano et Olivier Nakache est « une fable relou et démagogique » Un de leur principal argument est que le personnage joué par Omar Sy est trop caricatural. Pas faux. « Driss » est un brin délinquant, un peu bas-de-plafond, sans emploi, fumeur occasionnel de shit, dragueur, vanneur et tellement bon danseur… C’est vrai que cela fait un peu beaucoup. Mais qu’est ce qui dérange le plus ? L’unanimité béate autour de ce film (qui c’est vrai peut rapidement devenir insupportable) ou les clichés du personnage joué par Omar Sy ? C’est encore un autre débat : le rédacteur en chef de Rue 89 apporte un avis intéressant.
« Intouchables » est tiré d’une histoire vraie. Le personnage de « Driss » s’inspire de la vie d’ Abdel Sellou un jeune magrébin. Vous voyez Rochsdy Zem ou Tahar Rahim dans ce rôle ? Impossible. Et Jamel ? Le pauvre ne s’est pas décarcasser à appeler son premier fils « Léon » pour jouer « le jeune-rebeu-de-cité » non ?! Il a dépassé ce stade et tant mieux pour lui. Par contre cela en dit long sur la condition et la représentativité des acteurs Noirs français au cinéma. Et s’il fallait passer par là ? Notez qu’ aux États-Unis, souvent cités en exemple même s’il y a du progrès pour une poignée (Denzel Washington, Samuel L. Jackson, Don Cheadle, Forest Whitaker) d’acteurs reconnus combien d’autres restent cantonnés aux rôles de petite frappe, gros bras ou de comique hystérique ? Si Omar Sy gagne ce César espérons que cela lui permette de dépasser ce genre de rôles.
JOEYSTARR dans « Polisse »
C »est un cas particulier. Avant d’être Noir, JoeyStarr est d’abord une star. N’en déplaise au (plus si) jeune Booba ‘(« NTM, Solaar, IAM c’est de l’Antiquité » balançait-il sur « B20ba ») la star en France reste JoeyStarr. Son premier rôle de « grand méchant loup » Didier Morville l’a joué avec brio : il a été condamné à quatorze reprises par la justice française dont cinq fois pour violences. Rappeur incandescent, grande gueule en plateaux télé, une vie dissolue, de la prison, des procès… Joey Starr a tout connu.L’acteur Didier Morville dés ses vrais débuts au cinéma dans « Le Bal des Actrices » a brisé cette image. Il a été couronné d’une nomination au César du second rôle masculin.
Avec « Polisse » la « Starrmania » (Merci Jean Roucas) prend une autre dimension. Couverture et portrait élogieux dans GQ, Le Nouvel Obs parle de « Rédemption », une pluie de louanges sur les plateaux de télévision : il est limite obligé de s’excuser. Dans son rôle de « Fred », Joey est selon moi resté dans son créneau. Pour l’avoir fois plusieurs interviewé le Jaguar (roublard, drôle et le coup de griffe facile) n’est pas très éloigné de ce personnage. Peut-être que je me trompe. Comme il enchaîne les tournages (il travaille sur Les Seigneurs d’Oliver Dahan ) et tiendra bientôt le rôle d’un gay dans « L’Amour dure trois ans » de Beigbeder : je pense qu’on sera vraiment fixé.
FABRICE EBOUE et THOMAS N’GIJOL dans « Case Départ »
Fers de lance du stand-up à la française, sortis avec « mention très bien » de la Jamel Academy Fabrice Eboué et Thomas N’gijol n’ont pas chômés. Dans ce film ils sont acteurs mais aussi coréalisateurs et coscénaristes. Le pitch est simple : Joël et Régis Grosdésir se retrouvent dans une plantation des Antilles au temps de l’esclavage. N’gijol en « caillera de base » et Eboué en « bounty » adaptent le procédé du tandem comique et concentrent les rires sur leurs personnages. L’Esclavage un crime contre l’Humanité méritait-il pour son premier traitement au cinéma français d’être la toile de fond d’une comédie ? Je ne sais pas.
Certains anachronismes et clin d’œil m’ont fait rire. D’autres un peu poussif m’ont parfois mis mal à l’aise. Tant pis. Fabrice Eboué et Thomas N’gijol ne sont pas des historiens, ni des politiciens : leur principale mission n’est pas d’enseigner ou d’éclairer la France sur les monstruosités de l ‘Esclavage. Leur rôle est de nous divertir et en ce qui me concerne (malgré quelques réserves) la mission était accomplie. Qu’aurait-on dit s’ils étaient tombés dans un manichéisme lourdingue et une morale trop pesante : deux des principales critiques contre « Intouchables» d’ailleurs. A contrario Eboué et N’gijol ont choisi les petits clins d’œil subtils (comme appeler le personnage du jeune fils de l’esclavagiste Victor en référence à l’abolitionniste Victor Schœlcher.) et l’humour. Comme dans le cas d’Omar Sy, espérons que ce bon film soit un marche-pied pour un grand film.
GAYE SARAMBOUNOU OUSMANE dans « Polisse »
Il joue le rôle du petit garçon arraché à sa mère. Si vous avez vu le film vous savez qu’il le mérite.
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